Frouzins. Frédéric Liévy, le paysan voyageur est expulsable Que sont-ils devenus ? L'intérieur du bungalow aurait besoin d'un coup de peinture. Frédéric Liévy le reconnaît. «Mais ici, on ne fait plus rien… Depuis le 17 octobre, on peut être expulsés à tout moment, alors…» Le temps s'est arrêté pour Fredo, son épouse Rose et leurs six enfants. Comme entre parenthèses depuis qu'une décision de justice a dit qu'étaient dans l'illégalité ses deux caravanes et son petit chalet installés depuis 2008 sur le terrain qui est sa propriété, chemin de Tréville à Frouzins. Illégal aussi l'élevage de poulets qui constitue l'activité professionnelle de ce «paysan voyageur». Comment en est-on arrivé là ? J'ai eu un problème à la hanche et j'ai dû penser à une reconversion professionnelle, j'ai voulu monter un élevage avicole. En 2007, j'ai acheté ce terrain de 13 ha avec une partie constructible. Depuis j'ai déposé quatre permis de construire ou autorisations mais tout a été refusé (1). Je paie pourtant la taxe sur le foncier bâti et la taxe d'habitation… Que s'est-il passé depuis cette condamnation ? Nous avons reçu un très gros soutien de la part des Frouzinois. Les gens se sont mobilisés sur le village, au marché, ainsi que les trente et une organisations membres du comité de soutien. Je les remercie, car on ne peut pas gagner seul ce genre de combat. On a distribué des tracts, on a fait des portes ouvertes : les gens ont pu voir que nous sommes une famille qui travaille, avec des enfants qui vont à l'école. Nos voisins sont avec nous dans les manifestations. Quant à l'exploitation, elle est calme, mais elle vit toujours. Et au plan juridique ? Il y a des recours contre les refus de permis de construire auprès du trib unal administratif et, au niveau européen, j'ai déposé plainte pour discrimination. Je suis éleveur, mais on m'a refusé l'eau, alors je fais avec le puits ; on me refuse un raccordement définitif à l'électricité : je dois changer de contrat chaque an née ; on me refuse les poubelles : j'utilise le conteneur de Villeneuve-Tolosane où je vivais autrefois. Je vois dans tout ça la continuation de l'anti-tziganisme qui existe en France de puis 1910 et la stigmatisation des gens de par leur origine ou leurs pratiques culturelles - car les agriculteurs qui vivent en yourte ont les mêmes difficultés. Y a-t-il un problème entre vous et Alain Bertrand ? Non, je tiens à dire qu'il n'y a pas de problème personnel entre moi ou ma famille et le maire de Fouzins. Mais en septembre, quand avec le collectif, le DAL et des Frouzinois nous sommes allés au conseil municipal, le maire a dit qu'il n'y aurait pas de terrains familiaux à Frouzins. Pourtant, le conseil général a validé le schéma départemental de la Haute-Garonne qui préconise les terrains familiaux et le maire de Frouzins, vice-président du conseil général, a voté ça ! Que souhaitez-vous pour 2013 ? Simplement bosser en paix. Je veux avoir la labellisation bio pour mon élevage, produire en première couronne toulousaine et faire du commerce de proximité avec des circuits courts. Son heure de gloire Paradoxe, c'est actuellement que Frédéric Liévy vit ses heures de gloire. Son combat à Frouzins lui attire le soutien de nombreux politiques sollicités par son collectif et suscite l'intérêt des médias. L'exploitation du chemin de Tréville a reçu des équipes de télévisions allemandes et belges. France Culture y est aussi venue en reportage. On s'interroge sur la singularité frouzinoise, ce refus des terrains familiaux qui reste exceptionnel. Chez les politiques, Catherine Grèze, députée européenne Europe Ecologie-les Verts, est un soutien de longue date. Frédéric Liévy a aussi reçu le témoignage de solidarité de Kader Arif. Et, en septembre dernier, le chef de cabinet du Président Hollande a écrit : «Le Chef de l'État est déterminé à rassembler ses concitoyens dans une République fondée sur les valeurs de justice, d'égalité, de tolérance et de progrès, et à mettre un terme aux discriminations que subissent les gens du voyage». |
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